Commentaire de la Parole
Mardi de la 8e semaine t.o. B
Siracide 35, 1-15 et Marc 10, 28-31
Nous voici de retour dans le temps ordinaire - 8e semaine - où nous reprenons la lecture suivie de l’Evangile de Marc. Pour la 1ère lecture située dans l’AT, nous ouvrons le livre de Ben Sira le Sage, qui fut un Scribe influent à Jérusalem autour de l’an 200 av. J.-C. Son œuvre rassemble toutes sortes de préceptes et de sentences pratiques, ainsi que des éloges de la sagesse et des prières. Aujourd’hui par ex. il nous donne ce conseil :
« Chaque fois que tu fais un don, montre un visage joyeux. »
Ce don, il en est question dans l’Evangile, où nous entendons Jésus réagir à cette remarque de Pierre : « Voici que nous avons tout quitté pour te suivre. »
On ne voit pas de prime abord s’il dit cela avec un visage joyeux…
Jésus le prend très au sérieux ; en commençant par « Amen, je vous le dis… » il donne du poids à sa réponse. Il est vrai que pour le suivre, on quittera maison, frères, sœurs ; et même une mère, un père, des enfants ou une terre. Non pour le regretter ensuite tristement, comme cela aurait été le cas pour le “jeune homme riche“ dans le passage précédant le nôtre.
Jésus montre au contraire la véritable motivation d’une telle démarche : Tout quitter, cela se fait, dit-il « à cause de moi et de l’Evangile ». Et en plus, le disciple recevra en ce temps déjà, le centuple, et dans le monde à venir, la vie éternelle.
Mais voilà qu’entre ces deux temps, Jésus place un bémol : « Avec des persécutions ».
Nous connaissons l’histoire des grandes persécutions qu’ont subies les chrétiens des premiers siècles. Celles-ci sont célèbres, mais il en est bien d’autres, plus cachées, jusque dans nos existences actuelles.
Voilà ce qu’en dit, à des jeunes en discernement, un prêtre de Naples, Gennaro Mattina, guide de montagne et expert en théologie pastorale : « Si tu suis le guide, tu peux devenir son compagnon, mais pour le monde, tu seras un hors-la-loi, comme lui ; tu sera sans patrie, sans maison, sans père et mère, jusqu’au jour où aussi le reste de ta famille et de tes amis décidera de te laisser seul à monter jusqu’au sommet.
Tu te diras alors : "Est-ce que cela vaut la peine de tout quitter ? Quel est l’avantage d’abandonner sa propre maison ? Quelle souffrance me causera le nouveau projet ? Pourquoi donc risquer de perdre ma paix ?"
La paix.
Arrivé au sommet, tu comprendras que la paix ne se poursuit pas sans lutte ; on luttera de plus belle pour que la paix déclare la fin de toute guerre ; entre peuples et entre les frères ; entre l’homme et la nature, entre l’homme et Dieu.
Et la lutte portera finalement du fruit : La haine se changera en amour, la tristesse en pure joie, la mort en vie. »
Et c’est Jésus lui-même qui ajoute ce dernier renversement de situation :
« Beaucoup de premiers seront derniers,
et les derniers seront premiers. »
En choisissant de suivre Jésus, on se fait dernier aux yeux du monde ; mais en réalité, le don sans retour fera de nous les premiers de cordée, les premiers selon la logique du royaume de Dieu.
Nous aurons alors toutes les raisons de montrer un visage joyeux !
Oui, que notre vie donnée joyeusement donne l’idée à d’autres d’oser cette aventure, selon le beau titre choisi par sœur Bénédicta pour son livre :
« J’eus l’idée de me consacrer totalement à Dieu »
Sr Jacqueline Lorétan